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Quelles opportunités et quels challenges à relever pour le secteur protégé?

depuis le jeudi 19 octobre 2006
Yannick BOULET | Président de l’ADCP (Association des directeurs de CAT de Paris)

Je suis le directeur d'un CAT de l'association Entraide Universitaire dans le 12ème arrondissement de Paris et j'ai de plus le privilège de m'être vu confier la présidence de l'Association des Directeurs de Cat de Paris, association regroupant actuellement 26 des 29 CAT parisiens.

Dans le cadre de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, il m'a été proposé d'intervenir en qualité de représentant du secteur protégé des ESAT ou CAT pour parler des opportunités que cette loi apporte à notre secteur.

Parmi les changements apportés par la loi de février 2005 elle même générée par la loi de 2002, il est utile de s'arrêter quelques secondes sur les changements de dénomination et de statuts.

Pourquoi les CAT sont devenus ESAT?

Les ESAT sont, à l'heure actuelle, les seuls établissements du secteur protégé puisque les « ateliers protégés » à la faveur de leur changement de dénomination en « entreprise adaptée » ont intégré le milieu ordinaire (rappelons qu'une entreprise peut maintenant créer sa propre entreprise adaptée, notamment dans le cadre du maintien dans l'entreprise).
Pourquoi ESAT (Etablissement et Service d'Aide par le travail) plutôt que CAT ?
Ce nouveau terme n'a jamais vraiment été expliqué aux professionnels dans sa philosophie d'où la difficulté, voire la résistance à s'y adapter.
Vous aurez d'ailleurs remarqué que j'ai maintenu le terme CAT dans ma présentation, ce qui n'est pas forcément un signe de résistance au changement. En effet, il faut penser que le mot ESAT est à considérer comme un terme générique regroupant à la fois des CAT et des Services d'Aide par le Travail appelés également CAT « sans murs ». Ainsi donc il n'y a aucune obligation à changer de dénomination.

5 moyens pour les entreprises de réponde à leurs obligations d'emploi

La loi de février 2005 demande aux entreprises de plus de 20 salariés d'avantage d'investissement en faveur de l'emploi des personnes en situation de handicap (terme que je préfère à celui de handicapé par trop stigmatisant). L'effectif d'assujettissement a été élargi, une AGEFIPH publique a été crée et les pénalités sont plus lourdes.
Les entreprises ont actuellement 5 moyens de satisfaire à leurs obligations légales en matière d'emploi de personnes en situation de handicap :

  • L'embauche directe
  • L'accueil de demandeurs d'emplois dans le cadre de stage
  • La conclusion de contrat de sous-traitance avec le secteur protégé jusqu'à 50% de l'obligation
  • Le versement d'une contribution à l'AGEFIPH
  • L'application d'un accord de branche, d'entreprise ou d'établissement
    • Plan d'insertion et de formation
    • Plan d'adaptation aux mutations technologiques
    • Plan de maintien dans l'entreprise en cas de licenciement

Les CAT (ou ESAT) sont directement intéressés par deux de ces moyens, avec l'embauche directe et la conclusion de contrat de sous-traitance

Former les travailleurs

Néanmoins pour rester réaliste, si la nouvelle réglementation a effacé les catégories A, B et C de handicap, pour autant, il subsiste une « hiérarchie » des situations de handicap qui, sur le plan de l'emploi ne place pas forcément les personnes travaillant en CAT en position favorable du fait de difficultés personnelles importantes.
Cette remarque est sans doute à mettre en corrélation avec une exigence de technicité et de compétence plus grande en ce qui concerne les emplois proposés. Les niches de « petits boulots peu qualifiés sont de plus en plus rares. Les impératifs de déplacements (permis de conduire) ou de logement peuvent également constituer des obstacles infranchissables.

Pour autant, nous ne renonçons pas et mettons une certaine opiniâtreté à préparer, notamment par la voie de la formation, les personnes qui ont un réel projet et de réelles capacités. Pour Paris, par exemple, le partenariat avec la cellule d'insertion inter-CAT permet l'accès à des formations ciblées et parfois diplômantes ainsi qu'un suivi des personnes concernées dans leur recherche d'emploi. L'accès à la VAE pour ces personnes constitue également en ce sens une belle avancée de même que nous encourageons la formation continue dans nos établissements avec souvent de faibles moyens, moyens que nous faisons parfois fructifier par le biais de certains mécénats d'entreprises.

Malgré la loi, la sous-traitance peine à se développer

C'est donc la conclusion de contrats de sous-traitance qui semble être pour les CAT le vecteur principal d'un partenariat économique possible entre l'entreprise et le CAT. Nous aurions pu penser que les obligations renforcées des entreprises amèneraient un flux d'affaires important. Pourtant, même si l'on peut parler d'un « frémissement » les effets ne sont pas encore très sensibles.

Il est alors certainement utile de se poser la question du pourquoi.
Peut être faut il que les entreprises soient persuadées du réel professionnalisme de nos établissements de leur technicité et de leur capacité à devenir de véritables partenaires commerciaux en terme de prix, de qualité ou de délais ainsi que de leur capacité à créer des synergies inter-établissements ou à s'adapter à la demande.
Nous savons respecter ce cahier des charges sans pour cela trahir notre mission médico-sociale.
Peut être les entreprises doivent elles mieux nous connaître et se rassurer quand à la qualité professionnelle que développent les travailleurs d'ESAT malgré leur situation singulière. En effet le handicap est par nature stigmatisant et l'image de « centre spécialisé » peu compatible ou habituelle des entreprises en terme de partenariat. Il est des cultures dont la rencontre est peu aisée. Nous savons par exemple à cet effet que certaines missions handicap au sein d'importantes sociétés rencontrent des difficultés à convaincre les acheteurs de prendre contact avec nos établissements.
Développer un partenariat économique c'est d'abord se rencontrer et à ce niveau, le parcours pour trouver le bon interlocuteur dans l'entreprise est parfois difficile. C'est ensuite convaincre. En ce sens, peut être reste t'il à nos établissements à savoir proposer leurs services de manière efficace ?

Le Réseau Gesat peut sans doute être d'une grande aide dans ce domaine à travers sa mission de « développement de l'image de marque et la promotion du travail protégé ». Se regrouper c'est certainement se donner encore davantage de chance de développer les synergies que j'évoquais précédemment et c'est sans doute également se donner des moyens plus importants d'être connus et reconnus. Une journée comme celle-ci ou de nombreux représentants d'entreprises sont présents ne peut que nous conforter dans cette idée.


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