Mise en place d'une activité démantèlement d'écrans avec Remondis, leader allemand de la gestion des déchets
Chaque mois, une entreprise, un établissement et un travaillleur handicapé témoignent autour d'un même projet. Reportage à l'Atelier des Bois d'Halatte dans l'Oise
Partenaires :
Ateliers du Bois d'Halatte 3, avenue des Bouleaux 60550 PARC ALATA VERNEUIL EN HALATTE Contact : Luc Camisassi |
Groupe : REMONDIS, Entreprise : REMONDIS Electrorecycling Localisation : ZI - 6, rue du 11 Mai 1967 60 110 Meru Secteur d'activité: traitement et gestion des déchets |
Février 2008 |
Le regard de l’Entreprise Adaptée
Le démantèlement, une activité prometteuse
35 tonnes d'écrans TV et d'ordinateurs à démanteler chaque semaine. Une équipe de 8 personnes qui fonctionne aux deux-huit. 5 camions hebdomadaires en réception, et 5 en expédition.
Chaque jour les écrans, confiés à REMONDIS par les déchetteries de la région, sont cassés et démantelés par les travailleurs de l'entreprise adaptée les Ateliers des Bois d'Halatte, située à Verneuil dans l'Oise.
Coques plastiques, tubes cathodiques, déviateurs, bobines de cuivre, fer, aluminium, bois, sont récupérés et triés dans des caisses ou des « bigs bags ». Ces produits repartent ensuite pour être recyclés au sein des différentes filiales de REMONDIS ou d'autres prestataires.
"Tout a été très vite"
Une activité récente, rapidement mise en place, et en plein développement. «Au printemps dernier, j'ai su par un autre CAT que REMONDIS voulait monter une Entreprise Adaptée pour faire de la déconstruction d'ordinateur. Puis j'ai rencontré le directeur général dans une réunion de groupement d'entreprises de l'Oise, et tout a été très vite» raconte Luc Camissasi, directeur.
«D'abord nous avons proposé de détacher une équipe dans les locaux de l'entreprise afin de tester l'activité.» Trois travailleurs de l'EA ont commencéà travailler dans une des usines de REMONDIS Electrorecycling à Méru en avril. L'expérience a été concluante, si bien que la société a voulu rapidement accroitre la quantité d'écrans démantelés.
Dans cet objectif, REMONDIS et la direction de l'entreprise adaptée ont décidé de rapatrier à la mi-septembre l'activité aux Ateliers du Bois d'Halatte qui offrait l'espace, mais aussi des facilités importantes pour les travailleurs du fait de la présence sur un même lieu d'un ESAT et des autres activités de l'EA : accompagnement pédagogique, locaux adaptés, navettes pour les transports...
Il a aussi fallu faire appel aux services d'une autre EA qui a détaché trois travailleurs pour agrandir l'équipe de Verneuil.
Développer la filière D3E
Aujourd'hui REMONDIS voudrait quadrupler la production. Pour répondre à cette demande, les Atelier du Bois d'Halatte vont s'associer à trois autres établissements protégés de la région.
Le Réseau Gesat finance une étude à partir de cette expérience pour la modélisation de l'activité dans le cadre du développement de la filière D3E.
A la fin de l'année, l'activité représentera 25% du chiffre d'affaire global des Ateliers du Bois d'Halatte.
Le regard d’un travailleur handicapé
‘L'important, c'est d'être tiré par le haut'
« Au départ, j'ai hésitéà accepter ce poste. Quand on a des responsabilités, il faut se lancer à fond et beaucoup donner ». Bruno Muller, arrivé en tant qu'usager au CAT des Ateliers du Bois d'Halatte en février 2006, a pesé sa décision avant d'accepter la proposition de la direction de faire de lui le chef d'équipe de la nouvelle activité démantèlement d'écrans.
Un équilibre retrouvé et un parcours fulgurant. Mais aussi des horaires, du stress, et du travail en plus. Aujourd'hui, Bruno Muller, un œil sur son écran d'ordinateur et l'autre sur la chaine où s'active l'équipe, avoue recevoir «beaucoup de satisfactions».
Au cœur du projet, Bruno est en contact quotidien avec REMONDIS. Avec eux il gère les commandes de camions, et leur rends compte des résultats tous les jours.« On est client, c'est à nous de gérer les flux ».
"Atteindre les objectifs"
En interne, il fait remonter les demandes de matériel, les états de réception et d'expédition de la marchandise auprès du chef d'atelier, et s'occupe de la gestion administrative, des emplois du temps. Il est responsable du suivi de production.« Je dois inciter mes gars à atteindre les objectifs »explique-t-il.
Ancien militaire, Bruno Muller avait déjà eu une expérience d'encadrement avant d'entrer au CAT puis à l'entreprise adaptée du Bois d'Halatte. S'il a retrouvé un rôle de chef d'équipe, il raconte avoir changé sa manière de travailler :« A l'armée, les militaires sont obligés de suivre. Ici c'est au chef de s'adapter, tout en veillant à obtenir des résultats. Je dois tenir compte du handicap dans la répartition des tâches, les travailleurs ne sont pas interchangeables ».
"Ils se donnent à fond"
Loin de le vivre comme une contrainte, il y a trouvé ce « plus » difficile à exprimer :« Ici j'ai découvert des gars très courageux, plus que dans le milieu ordinaire. Ils sont contents d'avoir du travail, ils se sentent utiles et retrouvent quelque chose, alors ils se donnent à fond ».
Désormais son but est que l'activité se développe, qu'il y ait des débouchés pour d'autres.
« L'important, c'est d'être tiré par le haut. Il le faut pour la planète, pour limiter nos déchets. »
Le regard de l'entreprise
Interview de Vincent Rouméas, ingénieur, Directeur des projets de développement chez REMONDIS Electrorecycling SAS
« Chacun apporte ses savoir-faire »
Comment se passe la répartition des rôles entre votre entreprise et l'EA ?
De notre côté, nous manageons et organisons la mise en filière DEEE, et nous fixons les objectifs. Par exemple on apporte notre expérience environnementale et professionnelle, notre connaissance de la réglementation ou des questions logistiques.
Ensuite c'est à l'établissement de gérer la vie et l'organisation de l'atelier. Pour améliorer la productivité ou monter en performance, nous donnons notre avis, mais on s'en remet vraiment à l'expérience de l'établissement. La gestion des hommes est son savoir-faire. Pour nous c'est très intéressant de travailler avec une structure qui sait gérer les différences et atteindre son objectif.
Que retirez vous de cette expérience ?
D'abord nous sommes très satisfaits et nous avons la volonté de l'étendre.
Ensuite cela nous incite à réfléchir. Au départ, nous sommes arrivés avec des idées sur la manière dont nous devions faire les choses. On a fourni un certain nombre de matériel pour démarrer. Au fur et à mesure, les travailleurs de l'atelier nous ont proposé d'autres équipements : utiliser une visseuse pneumatique ou installer un tapis roulant par exemple, des systèmes qu'ils avaient utilisés ailleurs. Un retour positif, qui a permis d'aller plus vite.
Nous pensions être arrivés au bout de la réflexion sur l'organisation de l'activité, mais
nous avons compris que nous n'étions pas forcément les mieux placés pour le faire.
Que conseillerez-vous aux établissements et aux entreprises qui veulent travailler ensemble ?
Pour les établissements, je dirai que cela peut être dangereux de se lancer dans des secteurs qu'ils ne connaissent pas bien. Pour cela, il ne faut pas hésiter à s'appuyer sur les entreprises qui apportent leur maîtrise du secteur.
Pour les entreprises, la bonne formule est d'abord de tester l'activité, puis de voir comment l'étendre. Il faut aussi essayer et ne pas se limiter seulement aux critères de coûts ou économiques.
La réussite vient quand deux savoir-faire se mettent ensemble : notre savoir-faire industriel dans notre domaine spécifique et le savoir-faire des ESAT et des EA.
Par Anne-Isabelle BARTHELEMY