Les achats responsables, un enjeu éthique, environnemental et financier : témoignage de l'association de lutte contre le VIH AIDES
Créée en 1984, à l'initiative du sociologue Daniel Defert et reconnue d'utilité publique en 1990, AIDES est la première association française (loi 1901) de lutte contre le VIH/sida et les hépatites virales en France et l'une des plus importantes au niveau européen.
AIDES est aujourd'hui présente dans 70 villes françaises en métropole et DFA (départements français d’Amérique), au plus près des personnes touchées, et entretient de nombreux partenariats à l'international. L’association emploie 450 salariés et compte plus de 1100 de volontaires (bénévoles). AIDES revendique et préserve son autonomie et son indépendance.
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Depuis 3 ans, AIDES déploie une politique de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) basée notamment sur le développement de sa démarche d’inclusion des travailleurs en situation de handicap. La valorisation de ces travailleurs passe par le développement ambitieux des achats auprès des ESAT et EA. Ainsi, en 2018, AIDES a confié pour plus de 200 000 euros de contrats à des structures du Secteur du Travail Protégé et Adapté !
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Quels sont, pour AIDES, les enjeux achats auprès des prestataires ESAT-EA ?
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Tout d’abord il y a pour AIDES, un enjeu éthique. En effet, de par son statut d’association, sa mission et la situation de handicap à laquelle sont confrontés certains de ses salariés et volontaires, il est important pour AIDES de mettre en place une réelle stratégie d’achats responsables et celle-ci passe par le développement des achats auprès des acteurs du Secteur du Travail Protégé et Adapté.
Par ailleurs, il y a aussi un enjeu financier. Comme toute entreprise ou organisme de plus de 20 salariés-es, AIDES est soumis à l'obligation d'emploi de 6% de travailleurs handicapés. Le non-respect de ce taux entraîne le paiement d’une contribution à l’AGEFIPH. N’atteignant pas ce taux via l’emploi direct, en raison notamment de la non-déclaration de plusieurs salarié-es, AIDES peut réduire le montant de sa contribution par l’achat de biens et des services auprès des ESAT & EA.
En 2018, nous avons acheté pour plus de 200 000 € de produits et prestations aux ESAT-EA, notre objectif est désormais de consolider et d’amplifier ce montant. Notre recours aux ESAT & EA est très divers. A titre d’exemple, sur les deux dernières années, les travaux de notre siège ont été réalisés par l’APAJH, le conditionnement de nos kits couleurs a été effectué par l’ESAT de l'arche en pays toulousain, du routage et de l’expédition ont été confiés à l’ADEP et à l’ESAT APF de Noisy le sec, l’ESAT Creuzier a réalisé quant à lui nos éco-cup…
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Pouvez-vous nous présenter le marché d’impression des célèbres « kits duo » de AIDES ? Comment le recours au Secteur du Travail Protégé et Adapté s’est-il intégré dans ce marché ?
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Jusqu’en 2017, AIDES achetait ses "kits duo" à un laboratoire. Le laboratoire fabriquait le gel lubrifiant et sous-traitait la fabrication des préservatifs et l’impression de la pochette. Je me suis alors demandé s’il ne serait pas plus pertinent d’éviter cette sous-traitance (génératrice de coûts) en segmentant le marché en trois lots distincts : un lot "préservatif", un lot "gel lubrifiant" et un lot "impression et conditionnement".
Dans ce cadre, Manix a remporté le premier lot, Phicogis, le deuxième et le troisième lot, réservé aux ESAT & EA, a été remporté par l'EA Handi-Print. Concrètement, Handi-Print reçoit et stocke les préservatifs et les dosettes de gel. L’EA imprime ensuite les étuis en carton et les découpe. Enfin, c’est l’ESAT de Valognes qui conditionne les kits. Pour cela, les travailleurs insèrent un préservatif et une dosette de gel dans chaque étui, le ferment et composent des lots de 10 étuis. Par ailleurs, Handi-Print, mis dans la boucle dès le début du projet, a été force de proposition dans la création du format de notre nouvel étui, travaillant conjointement avec notre pôle Editions.
Chaque année nous produisons ainsi et distribuons près de 800 000 "kits duo" lors de nos actions de sensibilisation. En plus de faire travailler des prestataires ESAT-EA, cet allotissement du marché nous permet de faire un gain d'achat annuel de 115 000 € !
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En quoi les achats responsables contribuent à la démarche environnementale de AIDES et à sa politique RSE en général ?
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Notre procédure Achats prévoit qu’à proposition équivalente (en termes de délai, de qualité…) et avec un prix n’excédant pas +10% du prix moyen des autres devis, AIDES choisit le fournisseur qui lui paraît le plus engagé dans une démarche de Responsabilité Sociale et Environnementale : produits recyclables, intervention d’une entreprise de l’Economie Sociale et Solidaire à but non lucratif, d’une structure de l'insertion, d’un ESAT, d’une EA…
Par ailleurs, en tant que structure responsable et engagée, AIDES s’implique dans le respect des droits fondamentaux et la réduction des impacts sociaux, environnementaux et éthiques de son processus d’achats. Notre charte des achats responsables, créée cette année, a d’ailleurs pour objet d’être un cadre de référence commun à AIDES et à ses fournisseurs, chaque fournisseur répondant de ses éventuels sous-traitants. Nous demandons donc à nos fournisseurs de signer cette charte, cette démarche étant essentielle à la continuité de nos relations commerciales.
Enfin, concernant notre démarche environnementale, nous souhaitons la coupler avec notre recours aux ESAT & EA. Ainsi, c’est l’EA Cèdre qui collecte, trie et recycle les déchets de bureau de notre siège de Pantin. Par ailleurs, nous réfléchissons actuellement à la mise en place de contrats régionaux pour l’entretien de nos locaux. S'ils aboutissent, nous souhaiterions confier ces marchés à des ESAT & EA mais imposerons dans le cahier des charges un certain nombre de critères environnementaux (produits non toxiques, consommation raisonnée d’eau…).
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