Création d’un atelier de réparation de vélos à assistance électrique à l’ESAT du Brezet géré par l'ADAPEI 63
Entretien avec Jean Marc BERNARD, directeur et Christophe CHABANNE, chef d’atelier
L’Esat du Brezet accueille 171 personnes au sein de ses 2 sites implantés sur la commune de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). Depuis sa création en 1968, les équipes ont développé des savoir-faire dans de nombreux domaines d’activités : menuiserie, mécano-soudure, prestations administratives, couture industrielle, etc.
Vous avez débuté en septembre 2016 une activité de réparation de vélos à assistance électrique pour le groupe La Poste. Pouvez-vous me dire comment a démarré cette activité ?
Cela fait plusieurs années que La Poste a initié le développement de son parc de vélos à assistance électrique et a engagé des relations avec le secteur du travail protégé et adapté (STPA) pour assurer leur maintenance. Un ESAT intervenait déjà sur cette prestation dans le sud de la France lorsque La Poste nous a sollicités pour savoir si nous pouvions répondre sur notre territoire. Disposant d'un atelier mécanique où nous avons développé un bon niveau de savoir-faire, nous avons répondu positivement.
Proposiez-vous déjà cette prestation ?
Pas du tout, c’est une activité que nous avons créée. Nous avons joué la carte de la transparence avec La Poste et nous nous sommes engagés à former notre équipe.
Ce qui a été déclencheur c'est que La Poste était déjà cliente chez nous. Nous réalisons en effet depuis plusieurs années l'entretien des chariots courrier du centre postal de Lempdes à côté de Clermont-Ferrand, prestation pour laquelle La Poste est pleinement satisfaite. L'entretien des vélos à assistance électrique est une activité plus complexe mais qui s’inscrit dans la même démarche : faire un diagnostic, changer les pièces, changer les roues, les plaques, etc. Du fait de l’homologie entre ces deux prestations, nous étions suffisamment confiants pour nous lancer dans cette nouvelle activité.
Quelles ont été les étapes de ce développement ?
Nous avons fait appel à différentes expertises pour mettre en place l'activité. Nous nous sommes notamment rapprochés de Cycleurope qui fabrique les vélos à assistance électrique de La Poste et nous les avons fait intervenir à l’ESAT pour expliquer le fonctionnement de l'activité et l'équipement à utiliser. Nous avons également pris contact avec le CNPC de Grenoble, qui est un centre spécialisé pour la formation professionnelle des vendeurs de vélos (pour Décathlon, etc.) et nous avons programmé avec eux une formation mixte de notre équipe, moniteurs et travailleurs.
Quels sont pour vous les prérequis essentiels pour se lancer dans ce type d’activité ?
La première chose est d'avoir un atelier orienté vers une base technique (assemblage mécanique ou électrique, mécanique auto ou moto, tourneur fraiseur…) et déjà un peu expérimenté sur ce type de maintenance, comme pour nous avec l’entretien des chariots courrier. Si on part d’un atelier de conditionnement avec un moniteur qui a une formation en gestion, je pense que cela va être compliqué et que La Poste ne suivra pas. Il faut un niveau de confiance par rapport au savoir-faire.
Combien de temps vous a pris la mise en place de l’activité ?
Nous avions annoncé un délai 6 mois à La Poste, ce qui a été tenu. C'était pour nous le temps nécessaire pour programmer les formations, mettre en place les engagements financiers et obtenir l'agrément Cycleurope (qui permet notamment de maîtriser le système informatisé de commande des pièces).
Nous avons démarré la prestation en septembre 2016 avec le centre postal de Clermont-Ferrand. Nous avons mis en place un circuit de récupération des vélos, d'abord avec ce premier centre qui représentait un parc de 120 vélos. Puis nous avons également couvert toutes les villes du sud du territoire et nous avons 2 à 3 points de collecte où nous récupérons et livrons les vélos deux fois par semaine. Nous sommes montés progressivement en charge. Aujourd'hui, nous travaillons sur un parc global de 160 à 170 vélos, ce qui correspond en rotation hebdomadaire à 6 à 12 vélos en moyenne.
Quel niveau d’investissement a été engagé ?
Nous avons investi 2 500 € en outillage (clés spécifiques, supports, etc.) auxquels il faut ajouter l'achat d'un stock de pièces détachées, demandé par La Poste.
Quel est le retour de vos travailleurs sur l'activité ?
C’est une activité très valorisante pour les travailleurs car les vélos sont des produits que l'on croise dans la vie de tous les jours dans les rues, et c'est une activité relativement technique. C’est une très belle activité pour un ESAT.
Envisagez-vous de travailler avec d’autres clients ?
Pour l'instant, nous sommes prudents et souhaitons nous roder parfaitement sur cette activité. Aujourd’hui, nous maîtrisons parfaitement les aspects techniques de la prestation mais nous pouvons encore optimiser la gestion du stock de pièces afin de les avoir en temps et en heure, en prenant en compte les délais de livraison par Cycleurope.
À l’avenir, l’expérience acquise nous permettrait d’envisager d'autres choses. Par exemple, si un grand compte travaillant avec Cylceurope nous sollicitait, nous pourrions répondre favorablement. En revanche, si nous décidions d’ouvrir la prestation aux particuliers, cela impliquerait une organisation complètement différente, ça devient un autre métier.
Avez-vous des conseils pour des structures qui souhaiteraient se lancer sur cette activité ?
Il faut bien prendre en compte l'aspect logistique de la prestation (circuit de récupération des vélos, gestion des stocks), partir sur un parc de vélos suffisant et sur un périmètre géographique maîtrisé pour faciliter l’organisation des tournées, avoir un moniteur qui maîtrise les aspects techniques et enfin, se donner du temps pour monter en compétences et mettre en place son organisation.
Un autre point essentiel, c'est la relation avec votre client. Dans notre cas, nous avons été transparents avec les acheteurs de La Poste et nos interlocuteurs ont tout fait pour que cette prestation réussisse. A l’inverse, certaines entreprises publient un appel d’offres pour faire démarrer la prestation le mois suivant ; or, pour les ESAT, un temps supplémentaire est nécessaire pour démarrer les activités dans de bonnes conditions. La Poste a joué le jeu, nos interlocuteurs connaissent le secteur et nous ont donné le temps pour démarrer sereinement l’activité. Cela nous a donné confiance pour atteindre nos objectifs. Le temps chez nous est un gage de réussite.