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Activité blanchisserie : les clés du développement

L’activité Blanchisserie s’intègre parfaitement parmi les activités en devenir du STPA. Nous avons rencontré Jean-Marc Gautron, responsable de la blanchisserie de Pessac Magellan pour l’ADAPEI  Gironde, qui a su transformer une petite unité de buanderie en blanchisserie industrielle.

Activité blanchisserie : les clés du développement

Monsieur Gautron, comment se retrouve-t-on responsable d’une blanchisserie industrielle dans un Esat ?

Après avoir travaillé dans le domaine de la blanchisserie sur différents segments durant plusieurs années, j’ai repris une blanchisserie à mon compte puis une seconde que j’ai fusionnée. Après une quinzaine d’années d’investissement personnel et d’implication forte j’ai fait un AVC. Ce fut un moment important qui m’a amené à me questionner sur mon activité et à bouger le curseur de mon quotidien professionnel. J'ai pris la direction d’une usine, toujours dans le même secteur professionnel, à Saint Mariens en Gironde puis en Normandie jusqu’en 2012. Cette fonction m’a permis d’adjoindre à mes compétences techniques toute la partie comptabilité et le suivi clientèle. J’ai noué les premières relations  avec le monde du secteur protégé et adapté dans le cadre de cette fonction, lors de la visite de l'usine par une délégation de l’Adapei Gironde qui désirait fusionner les deux petites blanchisseries de leur deux ESAT.

Durant la même période j’ai arrêté mes fonctions de directeur de l’usine de St Mauriens. J'étais toujours en contact avec l’association qui m’a proposé de m’occuper du projet de fusion et de le porter, et j'ai accepté la proposition avec plaisir. Moi qui étais habitué à la culture du chiffre, à la notion de productivité à tout crin, je découvrais un milieu où l’humain était au centre des préoccupations quotidiennes, ce qui a décuplé ma motivation et mon implication.

J’ai donc intégré la petite blanchisserie de l’Esat de Bègles pour m’imprégner des conditions de travail, apprendre à connaitre les personnes en situation de handicap, leurs encadrants, leur approche du travail, et ce jusqu’en octobre 2012 où la fusion des deux blanchisseries a été actée et où l’installation de la nouvelle entité, à l'Esat de Magellan s’est faite en une semaine.

Pour qu’une petite blanchisserie devienne un outil professionnel je présume qu’il y a eu de gros investissements ?

Effectivement de gros investissements furent nécessaires mais lissés sur le temps, avec en parallèle la montée en compétence des ouvriers. Nous désirions d’abord stabiliser la production, et avons donc gardé de l'ancien matériel comme les deux calandres puis, petit à petit, investi en fonction des premiers besoins et laissé le temps aux salariés venant des deux structures d’apprendre à se connaitre. Ensuite au fur et à mesure de l’accroissement de la production nous avons acheté du matériel. L’idée principale était que la production ne soit pas une gêne pour les travailleurs en situation de handicap et qu’ils s’adaptent à leurs nouveaux outils. Lorsque nous avons investi dans une plieuse automatique par exemple, nous leur avons donné le temps de bien la prendre en main et ainsi de suite.

Les nouveaux clients participent également à nos choix. Pour exemple, lorsqu’un marché avec une quantité importante  de linge en forme a été signé avec une maison de retraite, nous avons acheté deux mannequins soufflant pour faciliter le repassage à la main, un exercice très compliqué malgré ce que les gens pensent.

Il a-t-il eu des formations spécifiques du personnel pour l’utilisation du nouveau matériel ?

Non, pas réellement dans le sens où c'est moi qui choisissais les nouvelles machines et formais moi-même les personnes. Voyez-vous, a contrario de ce l’on peut croire, plus le matériel est sophistiqué plus il est simple d’utilisation.

Pouvez-vous nous indiquer le montant des investissements ?

Le prix du matériel en blanchisserie est extrêmement élevé, c’est la raison pour laquelle nous avons (j’ai) préféré investir dans du matériel d’occasion refait à neuf. Une machine à laver coûte à l'achat plus de 80 000 €, une calandre comme celle que nous avons entre 150 et 200 000 €. Le matériel d’occasion mais refait à neuf est souvent à la moitié du prix du neuf. Cela permet un développement plus rapide.

Quelles sont les cibles clients pour les établissements du secteur ?

Plus que les types de clients, ce qui est très important c’est un fichier d’apporteur d’affaires linéaires. Le travail saisonnier amène une rentabilité importante mais ponctuelle. En revanche, des clients aux besoins annuels sont plus sécurisants et vous apportent du travail quelle que soit la saison. Nous travaillons par exemple avec les maisons de retraite, des entreprises, des Mairies, de gros restaurants, des grands hôtels, etc.

Quels sont les écueils à éviter ?

La location. Les loueurs de linge sont nombreux à des prix extrêmement compétitifs, et il me semble que le secteur ne peut les concurrencer.

Quels sont les clés de la réussite pour une blanchisserie du secteur ?

Je vois deux choses. D'abord le suivi du client. Il est important de bien connaitre le client, le voir souvent, être à l’écoute de toutes ses demandes, les anticiper, être force de propositions. D'autre part, il ne faut pas chercher à avoir un développement de la blanchisserie trop rapide, car il est nécessaire de bien maîtriser tous les aspects de ce métier.

De votre point de vue, n’y a-t-il pas également une problématique de logistique de ramassage, de livraison mais aussi du tonnage proposé par cette activté ?

Prenez ERDF avec lequel nous travaillons, les établissements se sont répartis la charge de travail sur l’ensemble du territoire. Le démarche peut-être similaire pour tous les gros clients, il suffit de mutualiser les réponses. Il en est de même pour les problèmes logistiques : fédérerons, ayons des politiques tarifaires communes et partageons nous les marchés. Il existe suffisamment d’établissements en France pour s’engager dans ce processus et démarcher des clients importants, cela fait partie de ma réflexion.

Pensez-vous que le secteur est prêt pour emprunter cette voie et ne soit plus dans une logique du chacun pour soi ?

Je le pense et j’essaie de l’appliquer au quotidien. Dernièrement un client m’a sollicité pour intervenir dans une dizaine d’endroits dont certains trop éloignés de notre établissement. J’ai fait des recherches et trouvé des établissements dans les zones concernées. Je les ai appelé, leur demandant s'ils voulaient travailler avec moi, indiquant les prix et la qualité souhaitée. Leurs réponses furent évidement positives. Le plus important, c'et de faire le premier pas et les possibles s’élargiront !

Cela sous-entend-t-il que l’on pourrait avoir une certaine uniformisation des prix pratiqués ?

Nous devons y travailler, et c’est possible, la prestation pour ERDF en est l’exemple. Il y a peut-être des établissements qui ont des coûts de fonctionnement trop élevés dûs à une méthodologie de production non optimisée. Je travaille quotidiennement sur les techniques de production et je pense qu’en changeant peu de choses, vous pouvez augmenter votre charge de travail sans qu’il n’y ait aucune incidence sur le quotidien du personnel.

Le secteur blanchisserie peut-il être un secteur porteur du STPA ?

Deux, trois grosses blanchisseries ont fermé ces derniers temps et beaucoup proposent surtout de la location. Parallèlement nous sommes dans un environnement où les entreprises quelles qu’elles soient ont envie d’avoir leurs linges, leurs vêtements, leurs tissus... Ils sont donc de plus en plus enclins à rechercher des blanchisseries pour leur nettoyage. La réponse est donc oui.

Les certifications et les normes sont-elles incontournables aujourd’hui ?

La norme RABC, la décontamination et la marche en avant sont extrêmement importantes. Lorsque l’on vient vous démarcher c’est une des premières demandes car d’autres services y sont associés, les logiciels, la traçabilité, qui évolue d’ailleurs. Nous n’en sommes plus au code barre mais aux puces qui permettent de biper directement les vêtements dans le sac par exemple.

Désirez-vous ajouter un point que nous n’avons pas abordé ?

Je vous ai parlé de la relation client qui est un élément essentiel de notre activité, qui permet de résoudre facilement les petits problèmes qui peuvent se poser. Le deuxième point, c'est être en capacité à rebondir très vite sur chaque problème posé. J’ai élaboré des procédures pour presque tout. Le mode opératoire est écrit, l'ensemble des démarches aussi pour que le client ait une vision globale du fonctionnement de notre blanchisserie.

Lorsqu’un nouveau client potentiel nous appelle, je lui demande de venir visiter notre outil de production, qu’il puisse visualiser qui nous sommes. Nous avons encore besoin de casser tous les a priori que le secteur véhicule. Un exemple parlant : les représentants d'une Mairie qui sont venus pas très enthousiastes et en sont ressortis rassurés et ravis. Depuis cette importante Mairie est devenue l'un de nos principaux clients.

Entretien réalisé par Francis Piegza


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